Montedidio
de Erri De Luca
Mise en scène de Lisa Wurmser
Avec Chad Chenouga, Andrea de Luca, Léa Girardet, François Lalande, Jérémie Lippmann, Christian Lucas
Un jour ou l'autre, l'oiseau doit prendre son envol. Mais pour voler haut dans les cieux, l'oisillon doit d'abord se préparer.
C'est un peu sa vie que nous raconte Erri de Luca dans son roman Montedidio. En autodidacte depuis l'age de 20 ans, il publie son premier livre Non ora, non qui (Une fois un jour) en Italie en 1989, alors qu'il est dans sa trente-neuvième année. Un homme aux multiples casquettes. Il embrasse dans un premier temps l'action politique, puis il devient ouvrier spécialisé chez Fiat, manutentionnaire, chauffeur de camions, maçon... Il est également un alpiniste émérite. En plus de ses écrits et de sa collaboration avec de nombreux journaux (La Repubblica, Il Manifesto...), il rédige alors des billets d'opinion et des articles sur la montagne. Un écrivain modeste et passionné, à l'univers poétique, symbolique et enchanteur. Erri de Luca a reçu plusieurs prix pour ses uvres (en 1994, le Prix France Culture pour Acide, Arc-en-ciel ; en 2002, le prix Laure Bataillon pour Trois chevaux et le Femina étranger pour Montedidio).Montedidio, le parcours initiatique d'un jeune garçon de 13 ans dans les rues de Naples, qui apprend à grandir. Ses parents possèdent peu et n'ont pas d'instruction. La mère se meurt. Le père offre un objet magique à son fils, un boomerang. Un magnifique objet sculpté dans de l'acacia. Ni un jouet, ni un outil de travail, bien plus que cela : une arme. Un objet important à la forme d'une paire d'aile. Et qui devient le prolongement de l'enfant qui ne cesse de s'entraîner jusqu'au jour où le boomerang pourra enfin voler ! La vie n'est pas simple, et bien que l'enfant soit encore jeune, il doit travailler. Heureusement, son patron est un menuisier sympathique qui lui transmet l'amour de son métier. Dans l'atelier, au milieu de la sciure et des planches, il y a aussi le cordonnier bossu Don Rafaniello. Un homme doux, aux cheveux rouges et au cur gros. Un cur débordant d'amour et de tristesse car il est juif ; il sort tout juste des affres de la guerre ; et la blessure est loin d'être guérie. Lui aussi prépare son envol. Dans sa bosse, une paire d'ailes gigantesques fendillera sa coquille le moment venu pour l'emmener en terre sainte, à Jérusalem. Et au milieu de tout ce monde d'adultes un peu perdus et blessés, il y a l'amour naissant, il y a Maria. Une belle jeune fille de 13 ans qui doit composer avec des parents qui s'endettent au jeu, un propriétaire malhonnête et libidineux, les frissons qu'elle ressent pour le garçon, celui qu'elle appelle mon fiancé...Une histoire chargée de symboles et au sens profond. La passation du monde de l'enfance à celui rude des adultes tout en poésie et en images, à la manière d'un songe.Excellente idée qu'a eu Lise Wurmser d'adapter ce conte contemporain à la scène. L'adaptation est d'ailleurs joliment réussie. L'histoire est compréhensible et les très nombreux points traités dans l'uvre initiale sont plus ou moins présents. Pour retransmettre l'univers fantasmagorique de l'uvre, le visuel se devait d'être particulièrement réfléchi et soigné. Lise Wurmser fait appel à un chorégraphe, à un scénographe napolitain et même à un magicien pour donner vie aux mots d'Erri de Luca. Il manque cependant un ingrédient magique. Le rythme, trop linéaire, y est pour beaucoup. Tel un rêve avec sa part de cauchemar, le rythme devrait être en perpétuel mouvement pour accrocher le spectateur et le faire voyager. Trop régulier et trop lent, il semble que l'heure de spectacle soit plus longue que prévue. Les quelques effets magiques sont appréciables et font sourire, mais cela serait plus fort encore s'ils étonnaient et émerveillaient. La scénographie propose plusieurs niveaux de jeu et des éléments précis pour marquer l'action à Naples. Mais elle est trop massive et trop dure pour cet univers fantasmagorique et encore innocent de l'enfant qui se heurte à la réalité de la vie adulte. Le nid, lui, est une pure merveille ! Cette confrontation violente entre le décor et l'univers est certainement due aux lumières. Des lumières trop concrètes et crues pour cette uvre. Pourquoi pas un jeu de clair-obscur, des lumières tout en douceur, subtiles comme celles d'un lever de soleil, des couleurs et pourquoi pas un peu de fumée pour rendre l'évanescence de l'enfance ? Une chose est sûre, la conduite est à revoir.Les vidéos, visions précises d'une famille italienne, sont magnifiques et trouvent justement leur place dans la mise en scène. L'enfant se souvient, voit, et les images de ses visions, tel un film en noir et blanc, nous apparaissent sur l'orgue de sa vie. Un orgue bien construit, à la fois son écran (lien avec son enfance), son atelier de travail (outil indispensable de sa vie d'adulte) et son rouleau de papier où il écrit toutes ses pensées (journal intime gardien de ses idées, de ses interrogations, de ses angoisses...). Les musiques, de manière générale subtiles, apportent de petites touches discrètes au spectacle. La bande son mériterait même une présence plus marquée en accord avec la poésie du texte.Les comédiens sont agréables et investis mais certaines disparités dans le jeu donnent une impression de décalage. Jérémie Lippmann est étonnant en jeune garçon de 13 ans. Bien sûr, il est toujours délicat pour un adulte d'interpréter un enfant, mais son corps est investi. Tel un Arlequin, il est toujours sur le qui -ive et effectue diverses pirouettes appréciables à regarder. Il n'est ni grotesque, ni niais et son regard est même troublant. On y perçoit un petit garçon perturbé qui s'interroge sur les événements et ce qui l'entoure. Un enfant mature pour son âge mais dans sa bulle, un peu autiste parfois. Une vision intéressante certes mais sans trop de nuances. A 13 ans pourtant, on n'a pas continuellement la tranquillité d'un vieux sage. Surtout lors de la perte d'un parent et des premiers émois amoureux ! Il manque la passion, la colère, l'emportement et les poussées d'hormones incontrôlables à cet age. Bien qu'ils forment un joli duo, les personnages de Léa Girardet et Jérémy Lippmann ne sont pas accordés. Elle est une demoiselle ravissante alors que son personnage, Maria, n'a que 13 ans : elle en fait bien trois, voire quatre de plus dans son interprétation. Malgré les corps qui se touchent, on ne ressent pas l'émoi et les frissons. François Lalande, lui, apparaît touchant et très naturel dans le rôle de Rafaniello ; tout comme Chad Chenouga et Andrea de Luca qui jouent avec honnêteté et simplicité.Montedidio est un roman merveilleux ; les idées et les intentions de Lisa Wurmser pour son adaptation théâtrale sont judicieuses. Son spectacle nécessite simplement quelques réajustements et surtout une belle pincée de magie pour que la version scénique devienne aussi sublime que la version littéraire.
Cyriel Tardivel
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