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Trahisons
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de Harold Pinter
Mise en scène de Frédéric de Verville
Fidèles à l'esprit d'Harold Pinter
Les bons spectacles, comme les bons vins, nous augmentent, se prolongent en gorge, se prolongent le lendemain, nous prolongent, défont le temps, mettent "l'éternité dans notre poche" (conseil de Rilke au jeune poète :-) .Chère Lectrice, puisque les hommes ne lisent plus, paraît-il, j'ai envie d'être un peu paresseux. Mais pour toi, pas pour moi. Pour te simplifier la vie, car tu sais que j'ai la plume facile et que j'aime écrire. Mais pourquoi t'obligerais-je à lire la même chose en l'écrivant autrement ?A propos de cette pièce dans une autre mise en scène, au Lucernaire, je t'écrivais, car si j'aime écrire, c'est parce que je n'écris qu'à toi : "Les textes d'Harold Pinter sont des cadeaux, parfois empoisonnés. Ils
sont tellement bien écrits, précis, simples, sobres, sans effets, toujours sur le fil d'une voix intérieure, qu'ils sont nécessairement captivants quels que soient les interprètes et la mise en scène. On peut les lire seul, à voix basse, à voix haute, en bougeant ou pas, à
plusieurs, en les jouant ou peu, en amateur ou en professionnel... Ces textes ont une telle force théâtrale, essentielle, qu'ils attirent
constamment l'attention. Le piège est justement là. Car pour emmener les spectateurs "au-delà d'eux-mêmes", pour en faire les partenaires d'une sorte d'expérience rare que ce haut niveau rend justement possible, ce théâtre exige un travail de construction du sous-texte et des personnages avec de très nombreuses "couches", comme l'application de plusieurs douzaines de couches de laque chinoise."Je te laisserai, chère Lectrice fidèle (n'est-ce pas ?) lire la suite, acide, sur ce site [site] car voici la bifurcation : cette mise en scène-ci, de Frédéric de Verville, fait ce travail de laques et de sous-textes, et remporte ce défi, de manière remarquable. Je t'avoue, pour ne pas que tu te sentes trahie en le découvrant facilement, que l'actrice est une amie. Dès lors, je puis t'avouer aussi que j'allais dans ce joli théâtre de Neuilly avec une grande appréhension. Car le filage auquel Florence m'avait demandé d'assister en novembre, dans un public d'une centaine de personnes, m'avait semblé bien raide. Rude position que celle du critique envers ses amis.Maintenant, tu me croiras, j'espère, si je te dis que, non seulement j'ai très vite poussé un grand ouf mais que, de plus, j'ai poussé de grands aaaaah, à plusieurs reprises. Et l'amie qui m'accompagnait aussi. Ah, oui, comme c'est agréable, chère lectrice, tu t'en doutes, de passer une excellente soirée et de pouvoir dire du bien de ses amis derrière leur dos, et même en le pensant.Au fait, au fait ! Oui, oui... Mais comment ? Tu n'as pas encore réservé ? Alors que tu peux, peut-être, encore, bénéficier d'invitations, gracieuses, par le biais de La Theatrotheque.com (ci-dessous). En deux mois, preuve que le travail paie, encore, quelquefois, la métamorphose est étonnante. De raideur, il n'y a plus que celle toute minimale qu'il faut pour tenir encore quand autour de soi tout se déchire, lentement, par bribes polies, par secousses irréversibles. Je prends ce dernier terme qui évoque le film Irréversible réalisé bien après cette pièce, et globalement raté, je trouve. Car dans les deux sujets, l'histoire est racontée à rebours ; et de la fatalité finale, on découvre les petits choix, alors insignifiants, qui y ont conduit. Car dans ces deux uvres, il y a cette noirceur quotidienne et spongieuse des livres souverains de Jim Thompson.Mais c'est seulement dans cette mise en scène-ci de Trahisons que l'on trouve la fluidité du mal sans méchanceté et de l'ennui sans issue. On s'ennuie donc on se désire, on se désire donc on croit s'aimer, on
croit s'aimer donc on a peur d'y perdre ses repères, ses habitudes, son peu de Moi disponible. On a peur, donc on se trahit. Ici, le mal n'est qu'un briseur de rêves, mais n'est-ce pas de rêves que se hâte
notre vie ?Les acteurs se sont appropriés le texte et le travaillent encore dans la représentation-même : une certaine manière de dire le texte comme venant de soi, comme une première fois, et chaque fois la dernière, irréversible. Florence Bolufer joue avec une grande tendresse, une douceur enveloppante mais délicatement vacillante. Bien qu'Emma en soit maintenant séparée, ses deux hommes ne pourront jamais vraiment la quitter. Tous trois, ils cherchent, l'un à travers l'autre ce "surêtre" qui nous manque à tous, et dont l'absence éternelle nous est si difficile à surmonter. Les guerres de religion ne sont que le paroxysme des guerres conjugales : imposer l'Absent à l'autre, pour essayer de le supporter ; l'Absent, toujours trahi.La rupture, qui précède la pièce de quelques heures, les lancera tous les trois dans la mémoire, et ces petits flashes d'instants que crée toute séparation. Cette histoire à rebours qu'ils nous racontent, c'est chacun d'entre eux qui se la jouera. Chez l'auteur de génie, le fond crée la forme. Comme nous tous, ils veulent vivre plus, plus fort, plus intensément. Ils voudraient même bien renoncer à tout pour avoir un destin, cette étrange palpitation qui semble donner du sens à chaque instant. Mais renoncer à quoi ? Comment faire ? Comment incarner les grandes valeurs d'amour et de liberté, de sacrifice et de divinité, dans une vie bourgeoise toute quotidienne qui s'étiole hardiment. Autrement dit : comment se fait-il que l'amour conjugal soit si rarement une vocation ? Sauf chez la princesse de Clèves ;-)Ah, pour perdre ce vide qui me dévore, je serais prêt à me perdre, suggère le texte de chaque personnage un peu fêlé, un peu fou, fort égaré, sous ces contraintes de classe aisée (au bord de la jet-society, et ses enfers de regards cruels). Romain Bisseret joue Jerry avec une réelle fragilité, blessée. Il aime Emma dont le mari est son meilleur ami. Ce n'est pas bien ? "Mais qu'est-ce qui n'est pas bien ?", semble-t-il chercher, ne pas comprendre, dépassé. Robert, Frédéric de Verville, est un parfait Anglais (alors qu'il vient de Marseille), gentleman mais corrosif, amer mais de cet orgueil qui ne le laisse pas assez aimable, donc assez aimé, mais qui le voudrait.lls s'attendent, ils se tendent, ils se déchirent. Somme toute, ces trois personnages s'aiment mais ils sont non seulement aux prises avec ces désirs qui les ont pris "en traître" mais aussi avec l'absurdité de traditions monogames qui les empêchent d'en resplendir, de joies rutilantes. Réduire le désir, pour le cacher, donc le tuer, à petits feux. Trahisons, smog de l'amour ;-) Et pourtant, en nous faisant partager leur sacrifice, c'est notre liberté de jeu, et de transgression, qu'ils nous rendent aussi.Ce spectacle fort vivant, chère lectrice, ne trahit pas le théâtre : il nous rend plus indulgents envers nous-mêmes, grâce au plaisir d'avoir été bien joués. Donc, va, vis, joue ;-)
sont tellement bien écrits, précis, simples, sobres, sans effets, toujours sur le fil d'une voix intérieure, qu'ils sont nécessairement captivants quels que soient les interprètes et la mise en scène. On peut les lire seul, à voix basse, à voix haute, en bougeant ou pas, à
plusieurs, en les jouant ou peu, en amateur ou en professionnel... Ces textes ont une telle force théâtrale, essentielle, qu'ils attirent
constamment l'attention. Le piège est justement là. Car pour emmener les spectateurs "au-delà d'eux-mêmes", pour en faire les partenaires d'une sorte d'expérience rare que ce haut niveau rend justement possible, ce théâtre exige un travail de construction du sous-texte et des personnages avec de très nombreuses "couches", comme l'application de plusieurs douzaines de couches de laque chinoise."Je te laisserai, chère Lectrice fidèle (n'est-ce pas ?) lire la suite, acide, sur ce site [site] car voici la bifurcation : cette mise en scène-ci, de Frédéric de Verville, fait ce travail de laques et de sous-textes, et remporte ce défi, de manière remarquable. Je t'avoue, pour ne pas que tu te sentes trahie en le découvrant facilement, que l'actrice est une amie. Dès lors, je puis t'avouer aussi que j'allais dans ce joli théâtre de Neuilly avec une grande appréhension. Car le filage auquel Florence m'avait demandé d'assister en novembre, dans un public d'une centaine de personnes, m'avait semblé bien raide. Rude position que celle du critique envers ses amis.Maintenant, tu me croiras, j'espère, si je te dis que, non seulement j'ai très vite poussé un grand ouf mais que, de plus, j'ai poussé de grands aaaaah, à plusieurs reprises. Et l'amie qui m'accompagnait aussi. Ah, oui, comme c'est agréable, chère lectrice, tu t'en doutes, de passer une excellente soirée et de pouvoir dire du bien de ses amis derrière leur dos, et même en le pensant.Au fait, au fait ! Oui, oui... Mais comment ? Tu n'as pas encore réservé ? Alors que tu peux, peut-être, encore, bénéficier d'invitations, gracieuses, par le biais de La Theatrotheque.com (ci-dessous). En deux mois, preuve que le travail paie, encore, quelquefois, la métamorphose est étonnante. De raideur, il n'y a plus que celle toute minimale qu'il faut pour tenir encore quand autour de soi tout se déchire, lentement, par bribes polies, par secousses irréversibles. Je prends ce dernier terme qui évoque le film Irréversible réalisé bien après cette pièce, et globalement raté, je trouve. Car dans les deux sujets, l'histoire est racontée à rebours ; et de la fatalité finale, on découvre les petits choix, alors insignifiants, qui y ont conduit. Car dans ces deux uvres, il y a cette noirceur quotidienne et spongieuse des livres souverains de Jim Thompson.Mais c'est seulement dans cette mise en scène-ci de Trahisons que l'on trouve la fluidité du mal sans méchanceté et de l'ennui sans issue. On s'ennuie donc on se désire, on se désire donc on croit s'aimer, on
croit s'aimer donc on a peur d'y perdre ses repères, ses habitudes, son peu de Moi disponible. On a peur, donc on se trahit. Ici, le mal n'est qu'un briseur de rêves, mais n'est-ce pas de rêves que se hâte
notre vie ?Les acteurs se sont appropriés le texte et le travaillent encore dans la représentation-même : une certaine manière de dire le texte comme venant de soi, comme une première fois, et chaque fois la dernière, irréversible. Florence Bolufer joue avec une grande tendresse, une douceur enveloppante mais délicatement vacillante. Bien qu'Emma en soit maintenant séparée, ses deux hommes ne pourront jamais vraiment la quitter. Tous trois, ils cherchent, l'un à travers l'autre ce "surêtre" qui nous manque à tous, et dont l'absence éternelle nous est si difficile à surmonter. Les guerres de religion ne sont que le paroxysme des guerres conjugales : imposer l'Absent à l'autre, pour essayer de le supporter ; l'Absent, toujours trahi.La rupture, qui précède la pièce de quelques heures, les lancera tous les trois dans la mémoire, et ces petits flashes d'instants que crée toute séparation. Cette histoire à rebours qu'ils nous racontent, c'est chacun d'entre eux qui se la jouera. Chez l'auteur de génie, le fond crée la forme. Comme nous tous, ils veulent vivre plus, plus fort, plus intensément. Ils voudraient même bien renoncer à tout pour avoir un destin, cette étrange palpitation qui semble donner du sens à chaque instant. Mais renoncer à quoi ? Comment faire ? Comment incarner les grandes valeurs d'amour et de liberté, de sacrifice et de divinité, dans une vie bourgeoise toute quotidienne qui s'étiole hardiment. Autrement dit : comment se fait-il que l'amour conjugal soit si rarement une vocation ? Sauf chez la princesse de Clèves ;-)Ah, pour perdre ce vide qui me dévore, je serais prêt à me perdre, suggère le texte de chaque personnage un peu fêlé, un peu fou, fort égaré, sous ces contraintes de classe aisée (au bord de la jet-society, et ses enfers de regards cruels). Romain Bisseret joue Jerry avec une réelle fragilité, blessée. Il aime Emma dont le mari est son meilleur ami. Ce n'est pas bien ? "Mais qu'est-ce qui n'est pas bien ?", semble-t-il chercher, ne pas comprendre, dépassé. Robert, Frédéric de Verville, est un parfait Anglais (alors qu'il vient de Marseille), gentleman mais corrosif, amer mais de cet orgueil qui ne le laisse pas assez aimable, donc assez aimé, mais qui le voudrait.lls s'attendent, ils se tendent, ils se déchirent. Somme toute, ces trois personnages s'aiment mais ils sont non seulement aux prises avec ces désirs qui les ont pris "en traître" mais aussi avec l'absurdité de traditions monogames qui les empêchent d'en resplendir, de joies rutilantes. Réduire le désir, pour le cacher, donc le tuer, à petits feux. Trahisons, smog de l'amour ;-) Et pourtant, en nous faisant partager leur sacrifice, c'est notre liberté de jeu, et de transgression, qu'ils nous rendent aussi.Ce spectacle fort vivant, chère lectrice, ne trahit pas le théâtre : il nous rend plus indulgents envers nous-mêmes, grâce au plaisir d'avoir été bien joués. Donc, va, vis, joue ;-)
Philippe Dohy
20/01/2010
![Affiche](./index_files/bando-alaffiche.png)
AVIGNON
Chapelle des Italiens
de Alex Lorette
Mise en scène de Marie Gaultier
Quatre jeunes vont interpréter divers personnages en plusieurs tableaux pour nous "expliquer" ou plutôt nous dévoiler les rouages du harcèlement à l'école. C'est donc très original d'associer à l'histoire de Camille, l'histoire de Albi une truie albinos...
L'avis de Geneviève Brissot
Chapelle des Italiens
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AVIGNON
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Mouton Noir
de Alex LoretteMise en scène de Marie Gaultier
Quatre jeunes vont interpréter divers personnages en plusieurs tableaux pour nous "expliquer" ou plutôt nous dévoiler les rouages du harcèlement à l'école. C'est donc très original d'associer à l'histoire de Camille, l'histoire de Albi une truie albinos...
L'avis de Geneviève Brissot