Il y a, avant tout, les enfants, les gosses, ou les mômes, qu’importe le terme. L’un d’eux, poussé par sa mère, commet un crime : une maison brûle, un enfant meurt. Il s’enfuit, ses amis disparaissent. Mais ils font le serment de ne rien révéler. Sauf qu’ils ont emmené avec eux un homme immobilisé... Immobilisé ? Cet homme n’est-il pas une menace permanente au dessus de ces têtes blondes et innocentes ? Mais ces enfants ne sont pas innocents. Ils le savent bien, eux. Il faut être adulte pour croire à l’innocence de l’enfance !Les Enfants font penser à d’autre textes d’Edward Bond, tels que La Fureur des Nantis. Mais cette pièce-là n’est pas une pièce de ou pour "jeune", tant elle est noire, drôle, incisive, violente... tant elle est écrite avec un sens aigus de l’enfance, de sa naïveté, de sa passion, de sa fureur. Et c’est magnifique !Jean-Pierre Garnier est professeur à la classe libre du cours Florent. Il a l’habitude de travailler avec des enfants. Dans le cadre du cours, il a déjà monté Vague(s) à l’âme d’après L’éveil du Printemps de Wedekind, déjà une pièce parlant de l’enfance, de sa culpabilité, de sa douleur, de ses espoirs, de ses amours et amitiés. Avec Les Enfants, il a su faire une mise en scène qui, tout en paraissant simple, magnifie les héros errants que sont ces mômes. Il y a tout au long de ce spectacle d’intenses moments de poésie théâtrale, comme dans cette scène où les enfants se couchent, se recroquevillant petit à petit les uns sur les autres avec toute la tendresse que peut permettre la confiance qu’ils ont les uns pour les autres. C’est si simple, si fort, si efficace !Les comédiens brûlent les planches du plateau. Ils communiquent leur plaisir de jouer à la salle, avec une générosité provocante. Ils ne regardent pas à deux fois avant de se donner à leurs partenaires et au public.Edward Bond a écrit cette pièce pour un certain public : celui des collèges et des lycées. Il écrit pour un public oublié par les autres dramaturges, par les metteurs en scène et les comédiens. Il existe bien un théâtre pour les "petits", fait de contes et de couleurs. Il existe bien des pièces pour les "adultes". Mais il n’existe rien, ou presque, pour les enfants : si peu de chose qui parlent de cet âge de l’imagination, de la création de soi-même. Les Enfants a été écrit pour eux, Jean-Pierre Garnier l’a aussi monté pour eux. Pour qu’ils trouvent, et surtout les adolescents, une résonance d’eux-mêmes les aidant à se découvrir et à découvrir le théâtre à travers eux-mêmes.Les adultes ne sont pas pour autant exclus de ce théâtre car l’enfance n’est finalement jamais très loin. Ils redécouvriront peut-être une certaine vérité sur les gosses qu’ils ont tendance à vouloir oublier. Ils oublient que les enfants vivent dans le monde qu’ils construisent ou détruisent. Ils oublient que ce monde est aussi construit et détruit par les enfants. Les adultes n’ont pas le monopole du monde ni de sa destruction. Cette pièce ne dit pas "que laisserez-vous aux générations futures ?" mais "que croyez-vous que font les enfants ?"...La Theatrotheque.com vous encourage vivement à aller voir cette pièce et ces comédiens dont l’avenir théâtral ne peut être que prometteur.