EN TOURNÉE
EN FRANCE
EN FRANCE
I Am the Wind
de Jon Fosse, Simon Stephens (adaptation)
Mise en scène de Patrice Chéreau
Avec Tom Brooke, Jack Laskey
Un voyage "beckettien"
Patrice Chéreau monte I Am the Wind de Jon Fosse, auteur norvégien qu’il connaît bien puisqu’il a récemment mis en scène une autre de ses pièces, Rêves d’automne. Le projet a été co-produit en partenariat avec le Théâtre de la Ville de Paris où la pièce a été jouée au mois de juin et avec le Festival d’Avignon qui la présentera du 8 au 12 juillet 2011. Entre temps, on peut la découvre dans le sublime cadre des Nuits de Fourvière, à Lyon, du 15 au 18 juin.Optant pour la traduction en anglais de l’auteur Simon Stephens, le metteur en scène s’est entouré de son équipe habituelle, son collaborateur artistique Thierry Thieu Niang et le décorateur Richard Peduzzi. Ce sont deux jeunes comédiens britanniques, Tom Brooke et Jack Laskey, qui incarnent les personnages sans identité de la pièce, l’Un et l’Autre, embarqués sur un radeau de fortune pour un voyage symbolique et métaphysique.Difficile de résumer l’intrigue de ce "huis-clos" sur un bateau ; il n’y en pas vraiment. Deux hommes totalement isolés du reste du monde, seuls face à la mer, se retrouvent on ne sait trop où, ni quand, ni comment sur un bateau de fortune. L’Un et l’Autre, tels les Vladimir et Estragon de Beckett, échangent alors des propos à la fois simples et décousus. On ne connaîtra jamais leur identité, leur passé, leurs histoires ; seul l’instant compte, et l’instant c’est l’instinct de survie ; ce tête-à-tête maritime ne semble pas avoir d’autre but. C’est essentiellement en cela que le message semble beckettien : Dieu est mort, l’Homme n’a plus qu’à se rattacher au concret : la terre, la mer, la recherche de nourriture.Patrice Chéreau présente ainsi sa pièce : "Le vent menaçait, il s’est levé soudain. Ils sont deux sur un fragile bateau : une promenade en mer, un arrêt dans une crique, un verre de schnaps, un peu de nourriture. Et voici que l’un d’eux décide de pousser plus loin, vers la haute mer. Et nous sommes en haute mer déjà cela : figurer sur une scène de théâtre le voyage, le trajet, les îles au large, le brouillard et l’océan, calme et bientôt menaçant. Figurer dans un même mouvement la traversée du chenal et l’ombre de la dépression maintenue à distance et qui revient à toute force ; la fraternité l’amour ? , qui devient peu à peu intenable, de si peu de poids, jusqu’à l’accident final qui apportera le calme et la paix, la légèreté enfin. Un voyage à l’intérieur de deux vies entremêlées, une odyssée, un chemin paradoxal vers l’apaisement."Face à une pièce aussi dépouillée et sobre, à la fois par sa scénographie, grise et belle une mare boueuse de laquelle surgit une plate-forme articulée qui figure le radeau et par son texte les phrases sont courtes et constituées d’un vocabulaire assez basique le spectateur est dérouté. On ne peut s’empêcher de chercher les symboles, de se dire que c’est trop sommaire pour qu’il n’y ait pas un "message caché". On s’en veut presque de s’être ennuyé alors que c’est une mise en scène du grand Patrice Chéreau et que le texte, très répétitif certains diront que c’est une ode moderne , s’offre comme un long poème en prose. Oui, mais voilà, le spectacle ne dure qu’une heure et huit minutes et on s’est surpris à guetter le cadran de sa montre. Que faut-il en conclure ? La pièce est-elle trop épurée, trop simple ou, au contraire, trop difficile, trop métaphysique et peu accessible au grand public ? A chacun de trancher.
Caroline Vernisse
16/06/2011
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