Cette création théâtrale réalisée par Antoine Colnot de Stael est un recueil de témoignages extraits du journal intime d'Etty Hillesum. Etty est une jeune fille qui vit en Hollande... l'autre pays des Juifs gangréné par la purulence du nazisme.Une jeune fille comme toutes celles de son âge magnifiée par l'insouciance et la frivolité. Un regard profond qui cherche à percer les mystères de l'existence en se penchant intimement dans son corps. Son journal, le confident de ses découvertes secrètement mises sous clé. La quête de la recherche personnelle intrigue, interroge, étonne, exalte. La jeunesse, un parapluie protégeant des intempéries causées par les hommes. Des mots, le mot' heure de son expression, les sens de ce mot' heure, la conjonction des sentiments et des émotions.La mise en scène invite à déplier le paravent de la vie d'Etty. Sur la scène, trois souffles inspirent et expirent. Trois corps s'articulent dans une gestuelle désarticulée. Trois voix percent le silence obscur avec des mots lancés, ci et là, intimant d'être écoutés et respectés. Trois jeunes femmes en une, en mémoire à Etty Hillesum.Cette pièce suscite l'intérêt de l'autre et l'abnégation de soi. L'histoire de cette fille dans les années quarante, c'est le tragique destin de tout un peuple, la Shoah. L'histoire du monde marquée pour l'éternité derrière les murs de l'horreur. La devise à l'entrée des camps de la mort "Arbeit macht frei", une façon singulière de donner un semblant d'espoir à ces millions d'hommes, de femmes et d'enfants... Leur histoire, celle d'Etty, s'écrira sur les barbelés de la barbarie.La mise en scène porte la concentration du texte en démultipliant les trois éléments présents sur le plateau. Chacun est vecteur d'un attribut scèniquement mis en valeur durant l'heure de représentation, un corps, une voix, un souffle. Dans la salle, les gens retiennent leur souffle, les battements de cœur alternent avec la chorégraphie parfois violente, parfois légère comme la frivolité. La musique, une partition de notes du ponant et du Japon se confondent dans un lyrisme tragique.Les comédiennes personnifient la mémoire d'Etty avec élégance et gravité, sensualité et pudeur. Elles pénètrent sans complexité dans l'intimité du personnage. Une intimité complétement dévoilée à la fin du journal...Etty, une reconstitution intelligente et très poignante réalisée par Antoine Colnot de Stael. Audrey Boulanger, Anne Jeanvoine, Valérie Maryane sont émouvantes et réalistes. Etty sur la scène de la Comédie Nation, un journal intime mis à nu à la une de l'histoire.