Une Diva à Sarcelles
de Virginie Lemoine, Marie Chevalot
Mise en scène de Virginie Lemoine, Marie Chevalot
Avec Brigitte Faure, Jozef Kapustka, Pierre-Jean Cherer, Marie Chevalot
Loin des fastes dorés de l'opéra et des beaux quartiers, une diva invite un public fidèle à l'écouter, chez elle, dans une HLM de Sarcelles.
Virginie Lemoine, connue pour son rôle de maman poule dans la série Famille d'accueil, a écrit la pièce Une Diva à Sarcelles pour dénoncer le ridicule et l'incrédulité qui habitent et s'engouffrent chez les petites gens des cités recluses de la banlieue parisienne, Sarcelles ici.Le rêve, notion péremptoire qui se consomme à grands coups d'espoir chez les personnes dans la détresse. Le rêve, notion révolue qui se consume à grands coups de cafard chez les personnes dans la détresse.Le décor, un deux-pièces sans dessus-dessous sent le désordre d'une vie pas ménagée d'une femme sans le sou. Une femme, haute de ses rondeurs, forte d'une poitrine d'où jaillit une voix, la voie d'une vocation en voix de disparition, la voie de l'intermittence du spectacle. Le réveil mal assuré, une bouteille d'alcool assure le maintien de bon matin à cette femme de scène. La scène de l'opéra... voyage au cur de sa cuisine, coulisse des souvenirs d'un temps que les ténors ne peuvent pas comprendre.Brigitte Faure, belle à souhait, entre en scène, révérence faite à son public fidèle. D'un coup de télécommande, le concertiste, Jozef Kapustka, surgit de nulle part et prend siège au piano droit. Autre coup de zapette, la musique à commande s'exécute sous les doigts habiles du pianiste, la soprano entonne en fonction des airs de Bizet, Dvorak ou Gounod. La voix grave se pose sur le métronome de la misère de sa condition sociale. La voix grave échauffe le voisin du dessus qui, de noms d'oiseaux au non respect des règles de vie de la diva, vocifère à s'égosiller jusqu'à taper lourdement sur le plancher de l'intolérance. Bien mal lui en prit, Brigitte fait fi de ce voisin qui lui pourrit l'existence dès qu'elle commence à articuler de ses majestueuses mandibules, quelques notes en la. Lâcher sonore en compression entre deux cloisons aussi épaisses que peuvent l'être les difficultés de vivre sa vie d'homme et de femme dans une HLM d'une ville, Sarcelles où la vie n'y est pas plus belle qu'ailleurs ici ou là.La soprano ne laisse pas indifférent le gardien d'immeuble interprété par Pierre-Jean Cherer. L'amitié, quelques coups de sonnettes viennent interrompre les vocalises de la diva. Des nouvelles, des bonnes et des mauvaises, le gardien en apporte à celle pour laquelle il nourrit du quotidien la maxime "A cur vaillant, rien d'impossible".Courageux, est-il d'affronter les assauts verbaux de la soprano en prise sous l'alcool. Alcools, ébriété d'une vie qui boit cet alcool brûlant comme la vie... celle qui a été distillée par les frasques de la solitude. Les fantômes de Baudelaire, Apollinaire planent aux quatre coins du deux-pièces sans dessus-dessous de cette femme sans le sou. Le gardien d'immeuble, toujours accroché aux airs de la soprano, tente en vain de lui faire passer le mauvais vin, la lie de l'expulsion. Plongée dans les abymes de l'insouciance, un coup de télécommande, le concertiste s'invite dans le bal des pauvres, prend siège au piano droit et engage de sa présence invisible des notes de Mozart, Piazzolla. Les doigts s'agitent sur les touches blanches et noires, une magie articulée d'images intérieures.Comme par magie, le pianiste disparait de nouveau derrière le rideau de nulle part. La soprano, en prise avec les déficiences de sa crise existentielle, se voit aider par son ange-gardien, sous la forme de l'approche d'une experte en psychiatrie.Quels conseils pourrait-elle lui prodiguer sur l'ordonnance de la vie désordonnée qu'elle s'est octroyée et qu'elle porte en orgueil sur sa poitrine, la médaille de la grande soprano qu'elle a du être, qu'elle aurait pu être et qu'elle ne sera jamais, enfin qui sait.La cuisine, scène de ménage où pèle-mêle se côtoient sur la table, les gâteaux au chocolat, la bouteille d'eau de vie donnée par le vieux voisin passionné des chats, la vaisselle dépareillée, le menu fretin des petites choses du quotidien.Le public, toujours présent à écouter la soprano interpréter des airs d'Offenbach ou autres grands musiciens de renoms, s'invite dans ce petit monde invisible et ô combien imprévisible.Un matin, aux horaires ouvrables pour les huissiers et représentants de l'ordre, la porte d'entrée du deux-pièces s'ouvre brutalement de l'intérieur sur l'extérieur, l'intérieur d'une vie décousue sur un extérieur où règne la vie, ses rigueurs, ses contraintes, sa violence... un opéra de quat'sous pour monsieur tout le monde, sans musique.Une Diva à Sarcelles, antagonisme d'une société plurielle qui recense les gens ghettoïsés dans les cités HLM des villes où le rêve se noie dans l'alcool, l'existence dans l'indifférence, être bien en soi dans l'intolérance des autres. Cette diva merveilleusement interprétée par Brigitte Faure témoigne de la destinée d'hommes et de femmes calquée à la croisée des chemins, entre incertitude et solitude. Cette comédie musicale prête le verbe à rire sans discrétion à certains instants. La vie intérieure ne se regarde par l'illeton de la porte d'entrée, l'huis fermé à double tour sonne le glas de la misère humaine. La mise en scène de Virginie Lemoine donne le ton et le vrai, le ton de notre monde violent et indifférent.Une vie réglée sur le mode télécommande n'apporte que des plaisirs poivrés, épicés d'un zeste de cruauté.
Philippe Delhumeau
09/03/2010
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