La Cerisaie est sans doute l’une des pièces de Tchékhov les plus jouées ; aussi est-il toujours hasardeux d’opter pour un tel spectacle : ou bien le texte est mis en valeur, réactualisé, revisité par une mise en scène novatrice, et l’on passe un excellent moment ; ou bien cette dernière n’apporte rien de nouveau et, lorsque l’on connaît bien le texte, on s’ennuie fermement. En ce qui concerne Notre Cerisaie, vous pouvez la programmer en toute confiance dans votre planning de sorties théâtrales ; assurément, vous ne l’aurez jamais vue sous cet angle. Mais comment vous allécher sans trop vous dévoiler le spectacle ?La mise en scène de Sylvie Mongin-Algan joue sur la performance théâtrale, sur l’interactivité entre comédiens et public et sur une scénographie dépouillée mais symbolique. Certains tableaux de son spectacle ressemblent véritablement à des installations d’art contemporain. Ses acteurs eux-mêmes s’apparentent, au cours de quelques scènes, à des performeurs, livrant des bribes de jeu uniques, toujours inédites puisque toujours dispensées à de nouveaux spectateurs. En revanche, malgré ces recherches scénographiques, Sylvie Mongin-Algan conserve le texte de Tchékhov. Elle se contente de lui ajouter de courts morceaux contemporains, parlés ou chantés, qui viennent rompre l’atmosphère sérieuse et pathétique de l’intrigue. Elle invite ainsi les spectateurs à s’interroger sur les liens entre cette Russie du début du XXe siècle et notre société ; elle sollicite leur attention, réveillant à tout instant les esprits par des ruptures dans le texte. En outre, elle les fait aussi participer physiquement, notamment lors d’une partie déambulatoire de la pièce et autour d’un dîner !Spectateurs et comédiens se retrouvent ainsi souvent à proximité les uns des autres. Il est alors saisissant d’observer le jeu de toute la troupe de près, et même de très près. La prestation semble parfois à la limite de l’improvisation ; elle doit, en effet, quelque peu s’adapter au public et à ses réactions. La Cerisaie trouve, de cette manière, dans un décor sobre et contemporain, un élan de vie, un dynamisme que ne possède pas forcément en soi le texte d’origine. A découvrir !