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La Nuit des rois
Comédie-Française - Salle Richelieu (PARIS)de William Shakespeare
Mise en scčne de Andrzej Seweryn
Avec Gérard Giroudon, Véronique Vella, Thierry Hancisse, Coraly Zahonero, Laurent d'Olce, Nicolas Lormeau, Laurent Natrella, Guillaume Gallienne, Bakary Sangaré, Mathieu Genet, Audrey Bonnet
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Une tempête sépare Viola de son frère Sébastien et fait s’échouer la jeune fille sur les côtes d’Illyrie, gouvernée par Orsino, duc de Bracciano. Secourue par un brave marin, elle décide, pour échapper aux dangers et entrer au service du Duc, de se travestir et s’attribue le prénom de Césario.
La Comédie Française possède une extraordinaire capacité à se renouveler, et la consonance résolument moderne de cette pièce en est la preuve. Le thème central ainsi que la mise en scène relèvent de considérations contemporaines, sans que puisse toutefois être passée sous silence l'âme shakespearienne de l'œuvre.
La Nuit des rois est une étonnante et singulière construction où se côtoient sans ambages réalité et faux semblants, folie et sagesse, passions et frustrations. La pièce traite sans complaisance ses héros, en traquant leurs moindres vices, travers et contradictions. Chacun est renvoyé à se regarder tel qu'il est vraiment. Dès lors, les illusions en deviennent souvent désillusions, et le paraître devient une prison de verre pour l'être, qui ne peut se dévoiler sous ses traits réels.
C'est pourtant bien à visage découvert que Viola entre en scène, échouée là à la suite d'un naufrage qui lui a pris son frère jumeau. Dès son arrivée, elle décide d'entrer au service du Comte Orsino sous les traits d'un homme, pour pouvoir approcher cet homme dont elle s'éprend immédiatement. Mais cette passion n'est que source de souffrance puisque Viola est prisonnière du personnage de Césario, le confident et l'ami fidèle du comte, et que par ailleurs ce même Orsino nourrit un amour sans limite et plein d'abnégation pour la comtesse Olivia. Mais depuis la mort de son frère, la comtesse Olivia éplorée, vit dans le plus profond retranchement voilant son visage plein de grâces à la face du monde. Comble de l'ironie, Viola, dans le personnage de Césario le fervent serveur, va devoir se mettre au service de l'amour de son maître auprès d'Olivia. En retour, celle-ci n'éprouve que dédain pour l'amour dévoué d'Orsino, mais dévoile docilement son visage et par la même occasion ses sentiments au singulier Césario.
Autour de ce petit monde gravite toute un kyrielle de personnages qui se donnent réciproquement du relief et qui contribuent à brouiller les cartes, comme le fou dont les sentences n'ont de folles que la lucidité de leur bon sens.
Un troublant jeu de miroirs se construit peu à peu, où l'illusion devient réalité, alors que la réalité ne parvient à émerger que sous la forme d'un reflet déformé. Des miroirs qui créent un monde de quiproquos, de sous-entendus incompris et de malentendus explicites, d'où naissent le burlesque, le pathétique mais aussi la vérité finalement mise à jour.
La mise en scène se fonde en partie sur les codes classiques du théâtre, tout en exploitant avec finesse un décor surprenant et ingénieux. Le jeu des acteurs se décline alors à la fois sur le plan horizontal mais également vertical, dans un univers dont les cloisons sont pourtant robustes. Pour ce qui est des acteurs, rien ne sert de s'étaler sur la technique étant donné que chacun possède l'art du jeu. Toutefois, il est important de souligner que cette maîtrise technique ne prend jamais le pas sur les émotions.
La Nuit des rois ne fait que confirmer que le théâtre est un art majeur. |
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Mis à jour le 07/10/2003
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