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   L'Empereur d'Atlantis
La Croix-Rousse (LYON)de Viktor Ullmann, Petr Kien
Mise en scčne de Jean-MichaĂ«l Lavoie, Richard Brunel
Avec Christian Miedl (baryton), Stephen Owen (basse), Lucy Schaufer (alto-mezzo soprano), Rui Dos Santos (ténor), Ivi Karnezi (soprano), Baptiste Mouret (basse), Orchestre de l'Opéra de Lyon, Catherine Puertolas (flûte), Frédéric Tardy (hautbois), Sandrine Pastor (clarinette), Sergio Menozzi (saxophone), Pascal Geay (trompette), Guillaume Séré, Yi-Ping Yang (percussions), Futaba Oki, Agnès Melchior (claviers), Bruno Simon (guitare / banjo), Kazimierz Olechowski, Karol Miczka (violons), Daniel Formentelli (alto), Ewa Miecznikowska (violoncelle), Cédric Carlier (contrebasse)
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Avant toute critique, il faut replacer l’uvre dans son contexte historique. Cet opéra de Viktor Ullmann, compositeur tchèque, élève d'Arnold Schnberg, a été composé dans le camp de Terezin où il avait été déporté par les nazis. Là , aussi surprenant que cela puisse paraître, étaient rassemblés de nombreux artistes, qui participaient à la création d'une vie musicale de très haute qualité. C’est dans ce cadre qu’est né L’Empereur d’Atlantis, dont la fable a été imaginée par le librettiste Petr Kien, un autre déporté. L’histoire, qui se déroule dans une contrée imaginaire, Atlantide, où la Mort dépassée par les prouesses criminelles de l’Empereur Overall, refuse désormais de lui prêter ses services, fait donc sans cesse allusion au régime hitlérien. L’uvre fut longuement répétée à Terezin, avant d'être interdite de création. Viktor Ullmann et Petr Kien moururent dans une chambre à gaz d'Auschwitz le 18 octobre 1944. Et c’est seulement en 1975 que l’opéra fut créé à Amsterdam.
Aujourd’hui, Richard Brunel, directeur du Centre dramatique national de Valence, le porte à la scène avec la complicité de l’Opéra de Lyon. Il opte pour une mise en scène très théâtrale, dans laquelle musiciens et comédiens cohabitent dans le même espace scénique. Les premiers participent ainsi pleinement au jeu, se déplaçant même au cours de la représentation, ce qui dynamise la mise en scène, tout en faisant sens au sein de la fiction. Les instruments bien visibles sur le plateau, ainsi que les voilages noirs qui créent un jeu sur le montré-caché et séparent l’espace en deux, contribuent à la beauté de la scénographie. Tous les effets qui s’y ajoutent sont simples, mais féeriques, à l’instar la neige qui tombe soudain sur les protagonistes. C’est donc un bel opéra, un beau conte aussi, qui montre comment les hommes peuvent devenir des monstres, au point de concurrencer la Mort elle-même. La réflexion sur la vanité de l’Homme, sur l’horreur des régimes totalitaires et sur l’absurdité de la guerre est ainsi au cur de l’intrigue. Tout serait parfait si la musique, classée à la confluence de Kurt Weill, Gustav Malher, Bach, Schnberg, Mendelssohn et Joseph Suk, de la polyphonie et du jazz, n’était pas aussi dissonante. Jamais, ou rarement, les voix et l’orchestre sont à l’unisson ; la musique ne nous émeut pas, faute de cette harmonie qui caractérise les grands moments d’opéra. Le texte chanté en allemand, langue du livret, contribue également à nous laisser hermétiques à la partition. Mais c’est un sentiment très personnel, qui n’enlève rien à la qualité de l’ensemble.
Quand on sait qu’Ullmann, pressentant son départ vers Auschwitz en octobre 1944, confia les manuscrits de ses uvres à un autre prisonnier, Emil Utitz, le priant, s’il ne revenait pas, de les donner à Hans-Günther Adler, un ami pragois, chez le fils duquel le chef d’orchestre britannique Kerry Woodward trouva en 1972 la partition de cette uvre "empreinte d’humanisme et de tragédie, qui fait référence à la mort en tant que libération et paradoxalement à la Commedia dell’arte en tant que désespoir", qu’il porta à la scène pour la première fois à Amsterdam trois ans plus tard, on se dit que le Destin y est pour quelque chose, qu’il fallait que cet opéra soit vu et que la Mort a bel et bien été neutralisée par ses auteurs. |
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Mis à jour le 15/02/2013
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